Le vent soufflait doucement faisant danser à son rythme les robes feuillues des arbres sur son passage. Une feuille quitta son nid s'envolant, virevoltant, descendant inexorablement vers le cours d'eau. Elle poursuivait sa course au gré du courant, puis elle disparut sous le pont.

« Ils vous attendent. »

L'homme proche du balcon se retourna et acquiesça. Il jeta un dernier regard à ce cadre enchanteur avant de tourner les talons.
Les lourdes portes s'ouvrirent dans un crissement particulier. La lumière blafarde se réfléchissait sur les carreaux de tuiles croisées parsemées de poutres robustes. Lesquelles remontaient jusqu'au plafonds dans des arches magnifiquement ouvragées. Pourtant le regard de l'homme se porta directement sur les personnes assiégées à une table minutieusement sculptées d'un cœur percé d'une dague, le tout entouré de creux formant d'innombrables gouttes de sang.

« Nous sommes tout ouïe Maître Teskier. »

L'homme arbora un sourire suivi d'une courbette avant de pincer quelques cordes de son luth.

« Oyez, braves gens,
le triste récit
d’un héritier bien aimant
qui au bout d’une lame fut trahi.

De ses journées,
Ser Adam Staedmon
les passait à chasser,
jusqu’à ce qu’il s’époumone. »
---
~*~
La main sur l’épaule du jeune garçon aux yeux azuré, l’intimait de se figer en silence. Par delà les différentes tonalités brunes des troncs, il vit quelque chose se mouvoir. Plissant les yeux, la silhouette se détacha peu à peu. C’était un cerf! Ces bois majestueux se dressaient fièrement sur le crâne bestiale. Le petit jubila doucement de pouvoir contempler cet animal royal. Et bien que cela ne dura qu’un bref instant, il remercia son oncle, qui ne manquait jamais de l’accompagner pour la chasse.

Rajustant les perdrix à sa ceinture, le petit était fier des prises qu’ils avaient fait en ce jour. Il descendit la pente non sans empressement faisant voler les feuilles mortes sur son passage. Il s’arrêta cherchant des yeux son accompagnateur. L’arbalète de celui-ci était suspendue à un arbre, non loin gisait ses vêtements. Il apparut au détour de pierres mousseuses formant un semblant de grotte. Il mit la main l’épaule du garçon, l’intimant de le suivre.

« Tu sais que Tonton t’aime et te protège. »

~*~
« Bon trappeur,
il était aussi d’une grande bonté,
accueillant dans sa demeure
la gourgandine répudiée. »
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~*~
Elle était là assise sur le banc, la paume des mains sur l'assise. Son regard lointain était si appréciable. Il s'éclaircit la gorge et se lance.

« Lady Eyla, j'ai le besoin de m'entretenir avec vous. »

« Ser Adam. » fit-elle suivi d'un signe de la tête. « Eh bien ce n'e... »

« Depuis que je vous ai vu lors du dernier tournoi d'Oeildieu, toutes mes pensées sont vôtres. Vos cheveux sont d'une pureté espiègle quand le soleil les irradie. D'un vif affriolant vos lèvres deviennent alors que vous croquez de gourmandise dans une fraise pendant les jours de marché. Vous respirez la joie de vivre lors de vos danses improvisées dans votre salon. »

Elle en resta pantois, visiblement touchée par cet aveux. Comme je la comprends, peu d'hommes ont dû tenir pareille déclaration.

« J'aimerai vous offrir la chance d'être heureuse et comblée. »

Je le dis souvent les actes sont toujours plus parlants que les paroles et je l'approche de moi. Elle tremble à cette proximité et je scelle nos lèvres dans un baiser. Je sens que sa respiration tangue diablement, elle me dissimule son visage avant de partir dans le labyrinthe. Je ne la savais pas joueuse et ça me plaît bien plus que je n'aimerais l'avouer. Je lui laisse une légère avance, le jeu n'en sera que plus divertissant. J'avais l'embarras du choix pour suivre son chemin : parfum délicat vanillé avec un soupçon d'agrume, empreinte d'une chaussure au pied fin ou encore ses petits gémissements dû à cette « course ». Puis au détour d'un croisement, je mets fin à ce petit jeu. Ma main vint sur son épaule, l'intimant de venir plus près.

« Vous n'avez rien à craindre, je suis épris de vous. »

---

Le craquement de la roue sur le pavé faisait échapper des commissures de petits cailloux et de la poussière. La charrette fut arrêtée. Un dialogue s'engagea entre le cochet de fortune et l'un des gardes de la grande porte. Après quelques minutes, on lui fit passage et déjà dans la cour attendait la matriarche Staedmon. Une jeune femme habillée sobrement remercia le cochet et s'avança vers la dame.

« Lady Swann, vous répondrez au nom de Eyla maintenant. »

« Je sais… » Se voyant dévisagée par son interlocutrice, elle reprit. « Bien Lady Staedmon. »

« Parfait, Lauredie vous donnera des vêtements adéquats et vous montrera les quartiers des dames de compagnies. Elle sera votre référente. »

Des salutations de courtoisies se firent et la jeune Eyla suivi Lauredie sans un mot. Alors que la référente présentait les pièces environnantes, elle fut coupée par Ser Staedmon.

« J'aimerai souhaiter la bienvenue à notre nouvelle dame de compagnie si vous le souhaitez bien. »

Quand ils furent seuls, Eyla laissa cours à ses émotions et des larmes coulèrent sur ses joues. Le Ser prit avec douceur l'une de ses mains.

« Il peine mon cœur de savoir que votre famille ait été si cruelle. Vous n'avez rien fait de mal, vous n'avez qu'aimé. Vous voir dans un si triste état ma dame est tel un poignard me pourfendant. Soyez sans crainte, je vous protégerai. Vous ne manquerez de rien. »

~*~
« Notre héros béni des septs,
lors de la bataille d’Oeildieu,
ses ennemis, la foudre intercepte.
Adam pourfendit les miséreux. »
---

Les yeux se croisèrent, peu d’entre eux étaient réellement d’accord, pourtant ils n’avaient d’autres choix que de se soumettre à la volonté de cet homme. Il fut finalement seul dans cette tente quelque peu humide. Ses doigts glissèrent sur le papier froissé de la carte, l’Orage gagnait du terrain et il fallait que cela continu. Arrec Durrandon avait dans l’idée d'annexer tous le Conflans, ce qui ferait des terres de l’Orage plus grandes puissance de Westeros. L’homme comptait bien s’attirer les bonnes grâces du cerf.

Tout à coup il sentit un légère brise lui parcourir les chevilles, se retournant, il se trouva nez à nez avec un blondinet aux cheveux bouclés. Prit de surprise il eut un petit cri. Un des gardes rentra en précipitation.

« Un problème Ser Staedmon? »

Le Ser fit volte face, ne voyant personne d’autres que lui et le garde. S’éclaircissant la gorge, il reprit.

« C’était un test de réactivité et je dois dire que vous l’avez réussi avec brio. »

Le garde le regarda perplexe.

« Vous pouvez disposer. »

Le Ser attendit quelques secondes après que le garde soit parti, puis chercha des yeux son invité surprise. Lequel était dissimulé derrière un grand coffret. L’aidant à se relever, il soupira marquant son agacement.

*Tous les dialogues se font à voix basses*

« Par les Sept! Tu sais que je déteste quand tu fais ça! »

Le blond répondit d’un grand sourire.

« Hô Adam, tu joues les donzelles effarouchées maintenant ? Arrête de m’aguicher de la sorte, ça en devient indécent. »

« Cesse tes plaisanteries Neal… Demain nous attend le fer et le sang. »

« Ce que tu peux être rabat-joie. Tu n’étais pas comme ça au Septuaire... »

Adam soupira de plus belle et s’assit sur le lit, retirant ses bottes.

« Au Septuaire je n’avais la vie d’hommes entre mes mains. »

« En effet, tu avais quelque chose de plus vigoureux entre tes mains. » s’amusa Neal avec un regard provocateur.

Le brun leva les yeux au ciel. « Ce que tu peux être vulgaire… La guerre réclame du sang, elle se fout de savoir par qui elle est versée, contrairement à nous... »

Neal le rejoignit, se faufilant dans son dos, massant lentement ses épaules. « Je sais que tu t’inquiètes Adam, qui ne le serait pas? Et je te connais, je sais que tu as déjà tout planifié, les ordres ont été donnés. Maintenant il n’y a plus qu’à attendre. »

Il soupira d’aise, par les Sept qu’il appréciait cette attention. « Pourtant une voix me dit que ce n’est pas assez… »

« Tu réfléchis trop Adam. Tu sais bien que tu es béni par la grâce des Sept. » Jugeant qu’il n’avait pas assez de prise sur les épaules du Ser, il lui retira sa chemise. Il passa le bout de ses doigts sur les cicatrices jonchant le dos de son camarade.

Il demeura silencieux quelques instant. « Et si demain il n’y a plus de jour? »

« Qui a besoin du jour quand il peut en avoir toute la nuit? » lui susurra-t-il à l’oreille avant de la mordillé.

---

La colline était verdoyante et calme, un havre de paix bucolique. Cependant le temps tournait, pressentait-il l'effusion de sang qui allait se tenir? Les nuages gris donnaient l'impression qu'on était au crépuscule, pourtant l'aube était là il y avait encore un instant. Tapant sur les flancs de son étalon, Adam passait devant la ligne de soldats. Tous semblaient ordonnés et prêt au combat. Arrivé à ce qu'il considérait la moitié, il descendit de cheval. Il fit quelques pas avant de planter son épée dans le sol. Il mit un genoux à terre, collant le pommeau de son épée sur son front.

« Regarde ôh toi Guerrier! Nous sommes tous ici à ton image, prêt à répandre le sang. Confère nous force et courage, car nous allons livrer bataille en ton nom. Père, si aujourd'hui nous te rencontrons, puisses-tu nous juger équitablement et punir nos ennemis. Ôh Sept, bénissez-nous, permettez-nous de sortir victorieux aujourd'hui. »

Lorsque le Ser se releva, tout fut blanc un court instant suivi d'un grondement céleste grave. L'éclair avait frappé sur la forêt qui longeait l'Oeildieu. Des cris se firent entendre, mais ce n'était pas les hommes d'Adam. C'était les Conflannais dissimulés dans la forêt enflammée. Voyant ce spectacle, il n'eut de doute sur la providence de sa prière. Faisant vibrer sa lame, il la tendit en hurlant.

« Aujourd'hui nous ne sommes pas des soldats! Nous sommes l'Orage! Celui qui s'abat avec fracas sur l'ennemi! Unissons nos voix et nos lames! Chargez !!! »

~*~

« Les terres unifiées prospères
rendaient envieux les belligérants.
Notre Ser fut envoyé à Haye-Pierre,
pour leur rappeler leurs engagements.

Sur la route de la Rivière,
un odieux piège attendait l’émissaire.
Les insurgés attendaient dans l’ombre,
pour le poignarder afin qu’il sombre.

Cependant leur crime ne leur suffirent point.
Pour qu’il ne puisse être inhumé,
embrasé fut le corps du défunt.
Lançant parjure dans toute la contrée. »
---

Le regard lointain, cela faisait des jours que chevauchait le Ser accompagné de trois hommes assurant sa protection. La route n’avait pas été particulièrement dangereuse, hormis quelques villageois lançant quelques regards insistants. Adam pensait surtout que cela était dû au fait qu’ils voyaient rarement des gens de son statut parcourir les terres. Alors qu’ils n’étaient plus qu’à quelques heures de leur destination, un des hommes se sentit mal et tomba de sa monture. Un carreaux était niché entre ses omoplates, il était mort. Il fut vite rejoint par son camarade dont la pointe dépassait de son front. Le tireur était aguerris et Ser Staedmon quitta tout de suite la route principale pour tenter de réchapper à ce poursuivant invisible. Combien étaient-ils? Et voilà que son cheval se cambra sans raison, le faisant chuter lourdement sur le sol. Le dernier homme qui l’accompagnait avait accouru au plus vite pour l’aider à se relever. Empoignant sa main, il sentit celle de son sauveur faible. Sa gorge venait d’être tranchée dans un gargouillis immonde. Adam attrapa son épée, prêt à riposter. L’assaillant portait un châle turquin et ne montrait aucune hostilité. La lame retentit sur le sol tandis que l’homme dévoilait son visage.

« Neal? » Parvint-il à formuler, malgré sa gorge nouée.

« Nous devons partir et vite. » Lui dit-il en donnant sa main.

Le Ser fut perplexe, tout ce qui venait de se passer n’avait aucun sens. Et le pire dans tout ça c’était le comportant de son amant… Devant l’hésitation d’Adam, l’homme soupira.

« Nous n’avons pas le temps pour ça, je t’expliquerai tout ça plus tard. »

« Pourquoi? »

Il avait vainement espéré qu’il le suive sans faire d’histoire, mais il connaissait trop bien Adam.

« Toute cette histoire d’émissaire n’est qu’un complot pour t’écarter de ta maison. » Bien évidemment le Ser ne comprit pas de quoi il s’agissait. Neal le savait naïf, mais à ce point… « Allons Adam, tu sais très bien que c’est du suicide de venir à Haye-Pierre! Les tensions n’ont jamais été aussi fortes entre le Conflans et l’Orage. Tes parents y ont vu une opportunité de te faire disparaître et de déclencher une guerre! Maintenant je t’en supplie, par les Sept, partons! »

Les sourcils froncés, Adam entendait là la pire conspiration jamais ouïe de sa vie.

« Pourquoi tuer ces hommes? »

Le blond eut un ricanement que détestait par dessus tout Adam. « Pour te protéger sombre nigaut. Tu penses sincèrement qu’il était là pour ta protection? Adam tu vaux mieux que ça. »

La main du Ser bougeait frénétiquement, quelque chose de sombre était en train de se dérouler. Neal l’attrapa par l’épaule.

« Tu mens… Tu ments! MENTEUR!!! ASSASSIN!!! »

Les yeux exacerbés azure n’avaient rien de rassurant. Son amant frictionnait ses mains sur ses épaules.  

« Tout va bien se passer. Calme toi Adam, je t’en pr... »

Sa phrase fut coupée par un relent de sang, il sentit une douleur vive à sa poitrine. Baissant le regard, il constata avec stupéfaction cette lame qui le transperçait. Le Ser avait attrapé la dague de son amant pour le poignarder. Leur regard se croisèrent, ils étaient mêlé d’effroi, d’incompréhension et d’une désolation profonde.

Incapable de prononcer le moindre mot, il l’accompagna au sol et captura son dernier souffle dans un baiser humide de ses larmes. Il resta ainsi le temps qu’il fallut à son esprit pour se reprendre.Prenant un dernier souvenir de cet homme qu’il ne verra plus jamais, il prit sa main encore tiède et lui enfila sa chevalière sur son annuaire. Il sortit sa bota pour en répandre le contenu sur son ami cadavérique. Il fallut plusieurs minutes pour que des étincelles jaillissent de son briquet et prenne sur l’alcool.

« Je suis désolé… »

~*~
« Comble pour celui bénit par les dieux
au blason sanguinaire d’un cœur transpercé,
ne connaissant ni cérémonie ni adieux
ainsi fut sa terrible destinée.

Comment ne point réagir face à tel affront?
C’est au fer de l’épée qu’Arrec Durrandon
mettra terme à ces élans hautains remplis de dédains.
Depuis l’Orage gronde sur les Riverains chauvins. »

Les dernières vibrations des cordes du luth se mouraient en un silence pesant. Teskier scrutait la moindre réaction de ses commanditaires. Après un moment - qui lui parut une éternité, le Lord et la Lady firent mine d’approbation en tapant des mains.

« Votre renommée vous précède Maître Teskier. » Le Lord fit un signe à ses suivants qui apportèrent un petit coffret. « Que votre chanson soit scandée à travers les terres. »

« Ce sera fait, Lord Staedmon. »

Le Lord et la Lady avait un sourire de connivence, sentant là un accomplissement. Les écarts perpétrés par les Conflannais n'avait qu'assez durrer et ils jugeaient faible leur souverain qui ne prenait aucune disposition. Grâce à leur sacrifice, les choses allaient enfin avancer. Le temps du mépris n'était plus qu'une question de jours.

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La porte s'ouvrit dans un couinement aigüe. Le pas lourd, il prit place auprès du comptoir, les bottes remplies de terres. De son ceinturon il détacha deux lièvres qu'il tendit à l'aubergiste.

« Une nuitée et une cervoise, je vous prie mon brave. »

Le tenancier le regarda avec nonchalance, prenant le gibier, il beugla à son petit personnel de préparer une chambre et la mousseuse. L’homme au châle turquin ne prêtait guère attention au brouhaha qui l’entourait. Quand sa pinte arriva, il y porta ses lèvres. Bien sûr celle-ci était tiède et avait un goût étrange, mais il avait soif et besoin de cet élixir pour mieux trouver le sommeil.

« Lupus Turquin? »

Reposant sa chope vide, il tourna tout juste la tête. De son châle, seul le bas de son visage était visible.

« En personne. »

L’homme s’assied à côté de lui.

« La personne qui m'envoie serait intéressée par vos services. »

« Et mes services ont un coût. »

« Bien évidemment. Voilà une légère avance en gage de sa bonne foi. »

La bourse sur le comptoir fut vite consultée par Adam qui arbora un grand sourire.

« Vous avez toute mon attention. »