Une nouvelle apprentie [Bénédict-Lusia]

Une nouvelle apprentie

Ft. Lusia Willum, An -109 Mois 7, Villevieille

Les portes grandes ouvertes de mon atelier laissent une vue imprenable sur les outils et instruments entassés dans la salle. Dans l'encadrement des portes, une servante m'observe avec un visage surpris, tandis que quelques minutes plus tôt... je lui avais pris des mains ses balais et plumeaux de ménage. Hors de question de laisser un domestique nettoyer cette salle parsemée de précieux outils en provenance du monde entier. Qu'adviendrait-il de moi si elle faisait tomber par mégarde un alambic ou une lentille de Myr ? Je ne donne pas cher de ma santé cardiaque, ou même de sa santé à elle.

Les cheveux relevés dans un chignon négligé, un tablier autour du buste, et les manches retroussées, je m'applique à faire un brin de ménage avant l'arrivée de la demoiselle, Lusia Willum, qui sera mon apprentie le temps de quelques leçons. Une jeune femme de petite noblesse, qui devrait se sentir au combien honoré que je lui accorde de mon précieux temps. Grâce à mes connaissances sur les plantes et les substances empoisonnées, elle pourra sans difficultés se débarrasser de son prochain époux. Une raison supplémentaire de la retirer de la liste des prétendantes.

Par moments, la jeune domestique m'informe de l'emplacement d'un tas de poussière ou d'une toile d'araignée ayant échappé à ma vigilance. Cette situation ressemble presque à un petit jeu. Une fois la première couche de poussière retirée un peu partout, je déplace quelques chaises et tabourets jusque dans les pièces juxtaposées afin de pouvoir nettoyer un peu plus en profondeur. Les minutes passent, les meubles se déplacent, les manches sont desserrées et resserrées sans cesse. Le rythme de travail ne s'arrêtera que lorsqu'une autre servante viendra nous informer de l'arrivée de mon apprentie, qui sera directement escortée jusqu'à nous. La servante fermera les portes menant à mes appartements personnels pour garder mon intimité à l'abri des regards, tandis que je déplacerai une partie des meubles rangés et dépoussiérés vers leurs emplacements habituels de travail.

"Mademoiselle Willum, arrivez-vous plus tôt que prévu, ou suis-je en retard dans mes tâches ?" - dis-je d'une voix légère pour détendre l'ambiance.

On ne savait jamais quand on pourrait avoir besoin de poison. Jamais. Il valait mieux être prudent et Benedict Hightower semblait être le candidat idéal, non pas pour servir de test, mais bien pour m’apprendre. Je ne souhaitais tuer personne. Mais la vie d’une jeune dame étant ce qu’elle était… Il était parfois nécessaire de connaître un ou deux poisons pour s’assurer qu’on ne tentait pas de s’en prendre à moi. Ou à ma famille. Mon oncle comptait également beaucoup. Mais bien sûr, je ne faisais cela que dans le pur but de ma protection, pour pouvoir les identifier. On avait déjà tenté de détruire ma famille par le passé… Une fois. Mais pas deux n’est-ce pas ?

J’avais relevé mes cheveux en un fin chignon tout simple et passé une simple robe blanche et noire, les couleurs de la maison Willum et la borderie d’un squelette de dragon courrait sur l’une de mes épaules. Les armes des Willum après tout. J’inspirai profondément avant de sortir de mes appartements. J’étais habillée très simplement, mais si je venais à me tâcher… je préférais garder mes plus jolies robes pour d’autres occasions après tout. Plus importante. Mais je ne pouvais pas venir en pantalon ou tout autre types de vêtements trop masculin. Je sortis de mes appartements après une dernière caresse à Gribouille qui dormait au soleil. On m’indiqua la direction des appartements de Ser Benedict. Je me fis annoncer par une servante qui m’escorta jusqu’au laboratoire de l’homme. J’étais un peu en avance. Il semblait en pleins ménage… Les servantes nous laissèrent et je saluais l’homme d’une petite révérence.

« Je suis effectivement en avance de quelques minutes Ser Benedict. Je vous en présente mes excuses, mais je ne supporte pas d’être en retard et j’étais impatiente d’apprendre à vos côtés. J’espère que je ne suis point arrivée trop tôt non plus. »

Comme d’habitude, ma voix était légèrement voilée, rauque et cassée, tout ça à cause de la fumée qui s’était accrochée à mes cordes vocales lors de l’incendie. Si j’en avais parfaitement l’habitude, je savais que les premières cela pouvait surprendre.

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Ft. Lusia Willum, An -109 Mois 7, Villevieille

Je renoue les manches de ma chemise au-dessus de mes coudes. J'observe la jeune demoiselle, dont les cheveux noirs sont relevés dans un fin chignon. Elle porte une simple robe blanche et noire aux couleurs de sa maison, décorée d'une grande broderie. Je note la voix inhabituelle de la jeune femme, un élément intéressant.

"Ne vous excusez pas, il vaut mieux être un peu en avance que trop en retard. Je terminais à l'instant de remettre en place le mobilier. J'ai profité de l'excuse de votre venue pour faire un peu de... rangement et mise à jour." - dis-je d'une voix peu sérieuse.

J'entre dans la salle d'exercice pour attraper un livre écrit par mes soins, soigné d'une calligraphie impeccable. C'était un manuel recensant les différents poisons que j'avais pu rencontrer. Les documents listent les ingrédients nécessaires, leur rareté, leurs origines, leurs prix, leurs spécificités et les méthodes de concoctions. Bien entendu, la méthode d'utilisation de chaque poison était soigneusement notée et mise en évidence, accompagnée d'une petite note d'anecdote ou d'une suggestion. D'un geste, je tends le bouquin à la jeune femme.

"Choisissez celui qui vous intéresse le plus. Je vous conseille fortement de choisir un poison dont vous pourrez vous procurer facilement les ingrédients, avec une méthode de préparation à portée de vos ustensiles habituels et administré d'une manière qui vous semble facile." - dis-je d'une voix peu sérieuse.

J’offris un sourire à l’homme en remontant légèrement les manches pour être prête à travailler. J’inclinai légèrement la tête à sa remarque. Du rangement et de la mise à jour. Intéressant. Je fis glisser une mèche derrière mon oreille.

« Vous faites bien, on travaille toujours mieux dans un environnement propre et rangé ! »

Il disparut pour revenir vers moi avec un petit carnet qu’il me tendit, je le pris à deux mains pour le lire soigneusement avant de relever la tête vers le Hightower en silence. Un poison dont je pourrais me fournir rapidement les ingrédients. Intéressant.

« Je souhaite en particulier apprendre à reconnaître les empoisonnements et les antidotes les plus courants. On ne sait jamais ce qu’il peut se passer et je souhaiterais me prévenir de ce genre… d’incident ? Si l’on peut dire ainsi. Si je sais fabriquer ces poisons, je dois aussi apprendre leur antidote. N’est-ce pas ? »

Je gardais le livre dans mes mains, tournant une à une les pages, presque machinalement avant de revenir vers l’homme.

« Lequel, selon vous, de ces poisons serait le plus commun ? Et lequel devrais-je apprendre à neutraliser le plus rapidement possible ? »

Ce n’était pas une question piège, je voulais juste apprendre du meilleur et il me semblait être le meilleur dans ces domaines-là… et il me fallait apprendre tout cela, n’est-ce pas ?

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Ft. Lusia Willum, An -109 Mois 7, Villevieille

J'acquiesce silencieusement de la tête en tendant le livre à la jeune noble. La jeune femme me précise qu'elle souhaite en particulier apprendre à reconnaître les empoisonnements, et les antidotes les plus courants. Pour se prévenir de ce genre d'incidents.

"Évidemment. Les poisons sont aussi variés que les recettes de cuisine. Certains agissent en quelques heures, d'autres par une inhalation régulière sur des jours voir des semaines. Pour reconnaître les effets d'un poison... il faut non seulement en connaître de nombreux, mais également avoir une idée de l'identité de l'utilisateur... Partons de l'idée que votre empoisonneur est un Bieffois... le Corvenin semble être un choix probable. Il s'agit d'un poison capable d'arrêter un coeur." - dis-je d'une voix sérieuse.

Je fais signe à la demoiselle de prendre place dans l'atelier tandis que je farfouille parmi les végétaux en tout genres et autres fioles de liquides.

"Voyons voir les ingrédients pour un antidote..." - dis-je avec concentration.

Je ne cherchais pas à empoisonner les gens. Je cherchais à me protéger, protéger les gens que j’aimais. Mais avait-il besoin de le savoir ? Je pensais que oui, je le précisais… J’avais besoin de maîtriser et savoir pour tous les poisons possibles. Je lus tranquillement le livre qu’il m’avait confié. Il faudrait sans doute que j’en fasse une copie s’il ne voulait pas que je l’emporte. Je le questionnerais plus tard sur cela ! Je relevai les yeux vers lui à ses mots en inclinant légèrement la tête. Chacun avait sa manière de tuer. Fascinant. Si on voyait les choses ainsi… J’inclinai la tête à ses mots. Un Bieffois. Le Corvenin. Rapide et efficace… Et selon le contexte, rapide à mettre en place et peu de possibilité de le sauver.

« Chacun à sa recette de grand-mère pour tuer. Fascinant. Mais, soit le Corvenin. »

J’étais très légèrement grinçante sur ses mots. Je posai le livre sur la table pour me pencher avec Benedict dessus et apprendre à ses côtés. Je finis par lui désigner la recette du Corvenin, je n’avais jamais fait ce genre de chose… Antidote ou poison.

« Ce livre… Est-ce que vous accepteriez que je le fasse recopier, ou que je le recopie moi-même ? Cela à l’air d’une petite bible à garder sur soi… »

Très important. Très important pour moi.

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Ft. Lusia Willum, An -109 Mois 7, Villevieille

L'Art des empoisonneurs et des guérisseurs... magie noire ou magie blanche ? Une simple plante médicinale peut se transformer en véritable poison si mal dosé. Une femme devrait d'autant plus se méfier lorsqu'elle manie des plantes devant les yeux d'hommes...

"Recettes de grand-mère ? Pour certaines, littéralement. Les femmes sont souvent les plus sujettes à empoisonner leur époux. Vous devriez faire attention à ne jamais mentionner vos compétences à quiconque. Les gens se méfient plus des femmes intelligentes et compétentes. Jouer la prudence pourrait vous éviter d'être un jour traitée de sorcière... ou pire." - dis-je d'une voix sérieuse.

La jeune apprentie me demande une copie de ce livre, qui regroupe les recettes que j'ai moi-même compilé.

"Vous pouvez le recopier vous-même, mais c'est un ouvrage que j'ai rassemblé par mes soins, je ne voudrais pas voir trop d'exemplaires non signés dans la nature." - dis-je d'une voix sérieuse.

Je rassemble les ingrédients nécessaires à la préparation de l'antidote, puis je commence la préparation avec des gestes lents et précis, permettant à la novice de mémoriser mes actions, prendre des notes ou poser des questions.

Je posais mon regard sur le chevalier en restant silencieuse face à son avertissement. Comme-ci je pouvais le craindre, craindre tout ce qu’on racontait de moi… J’avais une voix rauque, j’avais survécu là où toute ma famille avait brûlé vive dans un incendie. J’eus un rire rauque avant de répondre.

« Vous parlez à une femme qui a survécu à un incendie criminel de sa demeure et dont toute la famille est morte brûlée vive ou presque. Pensez-vous déjà que je n’ai pas une réputation de chat noir ou de sorcière. Heureusement que j’étais enfant. Quant à empoisonner un époux, faudrait-il déjà que j’en ai un. »

Quant aux flammes. Et bien je détestais cela alors je m’en tenais toujours le plus loin possible es si apprendre les anti-poisons faisait de moi une sorcière, je n’imaginai pas si j’apprenais les poisons. Je posais mon regard sur le chevalier à sa remarque.

« Il aurait été indiqué qu’il s’agissait d’une copie de votre ouvrage. Ne vous en faites point. »

Je ne comptais pas lui voler la postérité de son œuvre. Mais j’aurais donc à recopier cela plus tard, je pris un carnet pour noter toute la préparation qu’il pouvait avoir à faire. Heureusement, que j’avais déjà de solide base aussi bien dans cet art que dans la botanique.

Sujet: Re: Une nouvelle apprentie [Bénédict-Lusia]

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