«La Mère ait pitié..­»

Quand Lady Anya Royce vit son mari revenir du champs de bataille, une flèche à la hanche et saoulé au lait de pavot, personne ne su quoi lui répondre. Le sang qui maculait leur armure, le grincement des plates contre le sol de pierre, le regard de son fils.

Oh, son fils. Elle voulu se jeter dans ses bras. L'embrasser, remercier la mère de lui avoir ramené son seul garçon... mais la boue le sang et l'air grave de celui-ci l'en découragea. Quelque chose est arrivé. Quelque chose de grave. Un regard derrière, par delà la cours intérieure en direction de la grande porte lui confirma ses doutes. Des blasons, tant de blasons. Hardyng, Waynwood, Arryn... Tant de blasons couverts de sangs, tous si loin de chez eux. Des hommes en déroutes.

Un bras l'agrippant, un écuyer, pour l'escorter à l'intérieur. Yohn ne porta pas plus attention à ses appels et questionnements qu'aux cris des blessés. Haletant, en sueur, Yohn resta debout, raide comme une pique. C'était un carnage. Un vrai bain de sang. Son père s'est prit une flèche dans les premières minutes et sans même s'en rendre compte, l'écuyer se retrouvait flanqué d'hommes qui l'appelaient ­«mon seigneur». Coupé du reste de l'armée royale, assaillit de toute part par les pieds noirs, ce n'est que dans un bref instant de lucidité qu'il cria «retraite» à plein poumons. Traînant lui-même on père jusqu'à un cheval, il lui en fallu de peu pour rassembler le peu d'hommes qui l'entourait et sortir de ce piège sanglant.

Et maintenant quoi?

Ses poings se crispèrent dans ses gants -l'un d'eux devenu lambeaux- presqu'autant que ses dents, le goût du sang remplissant sa bouche. Crachant un coup, ses jambes finirent par débloquer et son regard, à se durcir. D'un pas déterminé, celui-ci fit signe à deux hommes -l'un des siens et un Arryn- de le flanquer alors qu'il traversa la foule gémissante jusqu'aux remparts. Le pas toujours autant assuré, Yohn commence à gravir les marches des remparts quand un Wyman Strong excédé lui tombe pratiquement dessus. Son regard vert semble aussi sombre qu'affolé.

«..On.. On à perdu..»

«Rassemblez les hommes.»

«Jeune seigneur, l-les bless.. AGH»

«FAITES CE QUE JE VOUS DIS!»

C'est sans égard pour la contestation qu'il agrippe l'épaulette du maître d'arme pour l'envoyer dans les escaliers, continuant lui-même son ascension. Aujourd'hui est son jour de gloire. Aujourd'hui est le jour qui inspirera des chansons qui vivront après lui. Aujourd'hui est le jour ou Yohn Royce inscrit son nom dans les annales. Le roi est mort. C'est ainsi, sur un discours d'honneur et de vengeance, que les portes de Roche-Aux-Runes se réouvrirent la nuit tombée pour y laisser sortir un peu plus de deux-cents hommes, déterminés à recouvrer le corps d'Osgood Arryn. Peu revinrent, mais ceux qui revinrent eurent en effet un histoire à raconter. Celle du chevalier Bronzé.