Le bon vin fait les bons amis

« Serviteur apporte nous du vin ! J'ai grand soif ! L'hospitalité est de mise quand on reçoit n'est-ce pas ? » Proclama d'un sourire enjôleur le jeune et impétueux Alestor Reyne. L'échanson arriva aisément au devant des deux seigneurs attablés confortablement. Le pichet de vin prêt pour assister au meilleur moment. D'un caractère insouciant il emplissait d'une belle lampée le verre de ser Adrian Tarbeck qui le toisait beaucoup plus sérieux et formel qu'auparavant.

« De quoi veux-tu me parler Alestor ? Cela ne pouvait-il pas attendre ? Le roi nous demande expressément. » Le visage insouciant du jeune homme se laisse attendrir par son ami d'enfance feintant d'un léger gloussement moqueur face à tant d'indigence.

« Le roi peut attendre encore quelques instants. Avec ses préparatifs et la guerre qui s'annonce il ne remarquera même pas notre absence. » Le lion rouge s’esclaffe mais Tarbeck le coupe sèchement.

« Tu te trouves amusant ? Bon sang, nous sommes en guerre Alestor ! »
Il frappe du poing sur la table marquant son mécontentement. Le jeune homme, lui, sursaute manquant de tacher ses vêtements.

« Pas encore. Que tu peux être ennuyeux quand tu t'y mets ! Regarde mon pourpoint maintenant ! » Il pose son verre maniérant du revers de son index les quelques gouttes perlant au coin de sa bouche.

« Tu es ivre, tu me fais perdre mon temps. » Indigné, Adrian se relève furieux tournant les talons.

« Attends ! Reste s'il te plaît je dois te le dire. » La main habile de son épée se saisit du poignet de son ami d'enfance, ses yeux croisant les siens pour reprendre l'ascendant. « Le Bief ne veut pas de cette guerre, toi non plus apparemment. Aurais-je tort ? »
Le silence du Tarbeck en dit long et le lion rouge encore une fois a vu juste.

« Nous pouvons convaincre le roi, ensemble proposons lui une alternative qu'il ne saurait refuser. Quelque chose de plus grand. » Adrian expire l'air grommelant et reprend place au côté de son frère d'armes sa main tapotant nerveusement le long de sa cuisse pour écouter attentivement.

« Faisons en sorte qu'il prenne pour épouse l'unique fille de Gyles III Gardener. Plutôt que de ruiner le royaume en hommes et en or dans cette tourbière, proposons lui une alliance. » Les yeux brillants d’ingéniosité du jeune Reyne s’émoustillent face au maigre sourire du Tarbeck qui saisit son verre pour boire à ce moment.

Le calme avant la tempête

« Beaucoup d'entre eux ont répondu à l'appel seigneur Harwyn. » Constate Lord Botley au devant de l'espace désigné là où la limaille de fer et le sel se mêlent au sable rugueux de l'île de Pyk. Les hommes se rassemblent de part et d'autres, on peut les voir. Ces grands guerriers insulaires, ces fils de putains téméraires, ces monstres dont les continentaux n'arrivent pas à se défaire. Les différentes maisons et leurs bannerets forment un cercle, Harloi, Greyjoy, Volmark, Tawney d'un côté. Salfalaise Orquebois, Timbal, Bonfrère et Vendeloyn de l'autre. Lord Harloi est le premier à prendre la parole s'avançant vers Harwyn Chenu.

« Pourquoi nous avoir rassemblés ? Tu n'avais rien de mieux à faire Chenu ? As-tu besoin d'aide pour satisfaire tes femmes sel ? » Le fer-né laisse échapper un rire tonitruant à en faire trembler la terre et nombreux sont ceux qui ricanent à la suite de leur confrère. Le seigneur Chenu mâchoire serrée et poings fermés jette un regard empreint de haine vers le Harloi sans daigner répondre sur l'instant même. D'autres observent silencieux mais n'en pensent pas moins à son sujet.

« Pourquoi sommes-nous ici Harwyn ? » Questionne à son tour Lord Timbal.

« Nous devons planifier les prochains raids, je vous ai convoqué pour cette rai... » À peine eut-il le temps de parler qu'il est coupé par un autre de ses congénères.

« Tu n'es pas mon roi sur cette île Chenu, tu es un fer-né comme nous autres rien de plus. » S'élance la voix du Bonfrère suivi de plusieurs de ses hommes et de bien d'autres capitaines. Une clameur qui ne plaît aucunement à Harwyn Chenu qui jusqu’ici laisse faire.

« Écoutez-vous ! On croirait entendre geindre une bande de continentaux. » Rétorque le vieux Tawney.

« Ne nous insultes pas vieux fou ! » Menace de sa hache Lord Harloi.

« Silence ! » Beugle Harwyn Chenu.

« Je suis ici pour réunir une armée capable d'envahir nos ennemis à terre, et vous vous n'êtes qu'une bande de faibles ! » Égrène-t-il en pointant du doigt par orgueil ses détracteurs.

« Je ne suis pas faible ! Et aucun de nous n'est faible ! » Déclare Lord Salfalaise. Les siens apportent leur soutien dans une clameur moindre mais entendue par tous.

« Le seul faible ici c'est toi Harwyn, tu as besoin de notre aide pour tes raids mais nous savons tous ici que tu as plus à gagner que nous dans cette affaire. » Les hommes s'échauffent et s'accordent sur les paroles du Timbal.

« Chacun est libre de faire ce qu'il veut comme bon lui semble. Ton ambition n'est plus la mienne, j'en ai assez entendu partons. »  Achève t-il passant au travers de la foule rassemblée. Au fur et à mesure que le cercle se disperse certains fer-nés restent et lancent pléthores d'insultes vers les différentes maisons rivales ou pour un simple regard de travers.

Fleurs brisées

Tout autour les sujets du roi attendent, ils écoutent, observent, chuchotent moult réflexions et questionnements au sujet du jeune seigneur de la maison Varnier. Il n'était pas le premier et ne serait certainement pas le dernier à s'avancer devant le roi Gyles III Gardener pour demander la main de sa fille. La plupart des dames et jeune ladys de la cour laissaient échapper quelques gloussements camouflants leurs sourires de jouvencelles et leurs rires derrière leurs éventails d'argent. Il fallait certainement du courage à Varnier pour se tenir à genou et entendre lady Aleria princesse et fille unique du roi l'éconduire dans une habilitée tout aussi exquise dans l'insignifiance et l'hypocrisie la plus tendre.

Le roi lui ne souffle mot, il reste péniblement éveillé lui qui avait pris pour habitude de prendre congé et de se reposer après ses repas le voilà entrain d’observer son pauvre Varnier se faire moucher allègrement. L'audience se termine, le jeune seigneur peut difficilement cacher ses joues empourprées par cet échange duquel il espère encore avoir une chance avant de prendre congé. En vérité, comme de nombreuses maisons avant lui, on le remercie surtout d'avoir tenté sa chance ce qui ne manque pas de faire rire Ser Merryweather dans la sobriété d'un sourire qu'il peine à retenir plus longtemps.

« Lord Varnier est un véritable chevalier. Respectable, bien éduqué... Vous ne trouvez pas Ser Merrywheater ? » En vérité Gyles III Gardener ne sait plus trop quoi dire, ni même penser.

« Absolument majesté. » Répond t-il stoïque.

« Je ne veux pas me marier. » Réplique la jeune princesse aux côtés du trône de son vieux père. La salle, peu à peu, se vide, les serviteurs refermant les portes derrière eux ne laissant qu'un entourage privilégié du roi autour de lui.

« Aleria ma chérie, tu sais que cela est impossible. » Le roi expire sa complainte, fatigué de ne pouvoir combler le vide de sa propre répartie. Si seulement son épouse était encore en vie, elle aurait trouvé les mots justes pour sa fille.

« Rester à vos côtés c'est là tout ce que je désire. » Réplique la jeune princesse s'agenouillant au devant de lui et saisissant la main lourde de son vieux père. La douceur de ses gestes, sa candeur et son visage angélique étirent les rides de ce faciès empreint d'une tendresse triste.

« Je ne suis pas éternel ma fille. Un jour tu devras te souvenir que le devoir l'emporte sur le désir. » Rétorque le roi Gyles peiné de ne pouvoir trouver la brèche dans le cœur de sa progéniture.

« Ne vous inquiétez pas pour moi, je suis là à vos côtés c'est tout ce qui m'importe. » Elle dépose un doux et tendre baiser sur les phalanges de son père avant de guider la paume de sa main le long de sa joue. Gyles III reste muet face à cette dernière, laissant échapper de son regard le chagrin d'une larme en songeant à quel point elle ressemble à cette épouse et mère qui lui a été injustement arrachée.

Crime et Châtiment

« Tiens toi prêt petit gars, c'est pas le moment d'avoir la frousse. »

Du haut de sa monture l'homme observe un convoi de marchandises aux abord de la Ruffurque. Le jeune Pyron, jette un regard craintif aux alentours se rassurant sur la fiabilité du plan qu'il a répété dans sa tête un nombre incalculable de fois.

« Tu es sûr qu'on va réussir ce coup là ? » Le visage du jeune homme vire pâle déglutissant à la vue du convoi et des soldats orageois se convainquant presque que cette entreprise va tourner mal.

« Tu sais ce qu'on dit, plus la bête est grosse, plus la récompense est grande. » Déclare Vernon d'un ton assuré. Un groupe de cavaliers avance au devant stoppant la progression du cortège. Pyron resserre sa main contre le pommeau de son épée, sa mâchoire bloquée ses yeux écarquillés au moindre geste l'appelant à s'élancer. La main d'un des compagnons flatte le flanc de sa monture. Le signal vient d'être donné. Et soudain de part et d'autres des fourrées l’assaut est lancé. Une clameur se fait entendre, dans le fracas des armes et le tintement des épées. Les hommes d'armes et cavaliers orageois sont submergés, assaillis de tout côtés. Le sifflement des carreaux fuse, transperce et déchire la chair. Certains finissent désarçonnés, tués ou noyés dans le fleuve. À la fin de la journée, les hommes éreintés repartent avec le butin durement gagné.

« Tu vois, c'était pas si difficile. Tous les plans reposent au final sur un bras musclé et de l'acier trempé. » Dit-il avec une pointe de fierté. Les yeux gonflés de fatigue Pyron arbore un maigre mais large sourire. Leur commanditaire, un seigneur riverain ambitionnant la couronne et le titre de roi du trident harangue depuis plusieurs semaines la légitimité de sa maison face à bien d'autres d'entre elles qui cherchent à recouvrir à leur indépendance personnelle.

Le roi Durrandon a eu vent de cette affaire, puis des autres sévissant dans l’ensemble de son royaume. Les seigneurs orageois dont lord Tignac et Staedmon ou encore Cossepois s'insurgent sommant le roi d'agir sur le champ. L'Orage et le Conflans, un royaume désuni plus aisé à conquérir qu'à conserver. Chemins et routes permettent d'acheminer provisions et soldats, tant qu'ils arrivent sains et saufs. De cruelles machinations prennent soudain vie, animées par un but unique. Les soufflets fonctionnent à nouveau. La forge est prête à fabriquer des armes de guerre. À celui qui est dépouillé, il reste les armes. C'est au fer de l'épée qu'Arrec Durrandon y mettra un terme.

Le Roi est mort vive le Roi

Le glas retentit par delà le massif. On peut l'entendre à travers le sifflement du vent s'engouffrant à travers les imposants massifs qui surplombent monts et vallées. Ils sont venu le chercher dans la tour blanche. Les nobles chevaliers du Val escortent pour son dernier voyage le roi Osgood Arryn. Le cortège dans une complainte silencieuse laisse entrevoir la dignité contrastée de larmes. Ils savent qu'il ne reviendra pas de la montagne, lieu de son dernier et éternel repos. Le vent venu de l'ouest vient marcher à leurs côtés, lui qui l'a vu combattre nombre de montagnards et l'a vu tombé. Son bouclier brisé, son armure fendue des pointes de fer de ses ennemis. La citadelle blanche surplombe et transperce la brume de ses sept flèches de nacre et d'argent. Inébranlables, les Eryiés accueillent les hautes maisons valoises dans la grande et vaste salle d'audience. Les colonnes de marbre blanc veiné de bleu accompagnent les trompettes d'argents raisonnant dans l'enceinte. La noblesse fixe son regard sur le jeune héritier qui ceint la couronne de feu son père et se relève la tête lourde et pleinement conscient de son devoir. Il ne faillira point, pour son royaume et le bien de son peuple, il vaincra les clans des montagnes.

« Longue vie au roi ! » Déclara Lord Corbray tirant Dame Affliction. La cour et les chevaliers présents imitent le seigneur de Cordial et font à leur tour raisonner leurs voix au sein du Castral. Les seigneurs et dames s'agenouillent sous l’œil soucieux  de la mère d'Oswin Arryn jeune roi de la Montagne et du Val.

L'heure du Veneur

L'âtre crépitant laisse échapper le craquement de quelques braises rougeoyantes. Dans un large fauteuil de bois se dessine la silhouette d'un homme d'âge mûr paré d'un manteau de fourrure inélégant. Dans l'obscurité de la pièce un serviteur s'avance silencieux, silhouette filiforme au teint d'une extrême pâleur, les joues creusées par la dureté des contrées froides du Nord. Il murmure à l'oreille du seigneur de Fort-Terreur des secrets inavouables aux desseins funestes et noirs.

« Le convoi acheminant les prisonniers à Châteaunoir a été intercepté et les hommes de la garde de la nuit exterminés comme ordonné monseigneur. » D'un signe de la main Lord Bolton congédie son laquais. Impassible il toise de son regard terne les braises noires s’affaissant pour mourir sur la pierre rugueuse et froide.

« La maison Stark n'a jamais eu l'autorité nécessaire pour régner d'une main de fer sur ces terres. » Déclare-t-il à lui même confortant son esprit maladif des pires exactions et crimes nécessaires à l'hégémonie de sa maison. L’œil cerné empreint de folie s'expose à la lueur des flammes. Le seigneur Rodrik toise les nombreuses parures, fourrures ornant la pièce, si bien qu'à la lueur d'une torche on peut entrevoir des cheveux, des peaux et faciès humains au milieu des vieilles tapisseries décousues, héritage macabre du Roi Rouge.

« Bientôt des peaux de Stark orneront ces murs ! »

Le temps du mépris

Son corps immobile s'éveille, se muant dans un espace étriqué à l'ombre des regards indiscrets. Il se tourne et retourne dans le panier en osier dans une forme d'immobilisme tangible. Une main vint le tirer de sa cachette, délicatement il ne se fait pas prier et laisse faire les mains expertes. La princesse contemple le reptile, la pigmentation noire de son dos incurvé cherchant à se mouvoir de manière plus aisée. Les billes obsidiennes du serpent restent figés dans ceux de sa maîtresse sa gueule ne laissant qu'une fine langue serpentine s'échapper de temps à autre dans un sifflement servile. Il finit par prendre le chemin de son avant-bras, de fines phalanges l'aidant à remonter le long de son épaule. Elle le place majestueusement sur ses épaules riant d'une malice indescriptible.

« Un jour il risque de te mordre, du fait de ton imprudence, ma sœur. » Avertit un jeune homme pointant la lame de sa dague sertie de pierres précieuses en direction de Naerys.

« Il faut prendre des risques dans la vie, tu ferais mieux de prendre exemple sur moi. » Taquine-t-elle dans un sourire aussi provoquant qu'espiègle. Le jeune Dorian Martell feinte une moquerie, et, préférant l'orgueil il croque dans un fruit et détourne son regard sur une autre femme, étrangement calme, selon lui.

« Et toi Sélènia tu ne dis rien ? » Rétorque-t-il sur un ton accusateur. Les yeux azur de la femme s'ouvrent observant l'espace vide du sol ramifiés de mosaïques. « Que devrais-je ajouté à cela Dorian ? » Questionne-t-elle sans attendre aucune réponse de la fougue stupide de son frère.

« Vos querelles m’indiffèrent, nous sommes princes et princesses de Dorne. Si le peuple et nos vassaux vous voyaient ils se riraient de nous. » Termine-t-elle sur une pointe d'hypocrisie à l'encontre de ceux qui partagent le même sang qu'elle.

« En revanche nous avons bien d'autres problèmes à régler. Certaines ethnies Rhoynars refusent obstinément de prêter allégeance à Dorne et donc à nous, préférant vénérer une entité morte depuis des siècles et refusent d'obéir aux lois dorniennes. » Le timbre de sa voix se fait plus défiant et sévère à l'encontre de sa sœur et de son frère.

« Aux yeux de certains de nos vassaux nous sommes entrain de devenir faibles, et cela, nous ne pouvons le tolérer. »

« Sélènia a raison, nous devons punir leur insubordination, faire des exemples. » Lance Naerys pestant dans un sifflement digne d'une vipère.

« Il est temps d'envoyer un message à nos ennemis et de montrer aux royaumes belligérants qui nous sommes vraiment. » Lance Dorian refermant son poing droit sur lui.

L'heure de la moisson

Si les désaccords entre les fer-nés persistaient plus que jamais, il y avait bien quelque chose qui les rallieraient sous une seule et même bannière. Richesse, gloire, prestige ! Tant de mots qu'Harwyn Chenu avait minutieusement ancrés et répétés dans l'esprit de ses vassaux et à la réponse de ceux-ci d'autres plus hésitants ou sous la contrainte s'étaient alors ralliés à lui. Le sang noir avait encore une fois frappé. Cette fois ses prières au Dieu-Noyé avaient été écoutées et c'est un raid bien plus dangereux et plus conséquent aussi qui fut lancé. Les maisons Berger, Greyjoy, Volmark furent les premiers à embarquer en direction de l'Est dans la baie du fer-né. Le vieux Tawney et le fils de putain d'Harloi avaient eux aussi leurs intérêts à faire pleuvoir le sang dans les contrées vertes. Chenu avait un plan, il en avait toujours un disait-on et les reproches qu'on lui avait soutenu pour le tenir en échec avait laissé un goût âpre derrière sa langue. De part et d'autres des navires les cors raisonnèrent non pas pour annoncer l'approche imminente des terres riveraines. Non c'étaient des côtes bien plus hautes et escarpés qu'ils accostèrent. Le ciel d'un bleu azuré surplombant de vaste étendues aux flancs de collines à l'herbe bien plus jaune qu'à l'accoutumée. Une terre riche et prospère que même la nature se teintait d'un pigment rappelant l'or jaune du Roc.

La maison Estren fut la première confrontée aux insulaires appelant le roi Lancel IV Lannister à prendre les armes pour repousser les incursions de cet ennemi profilant comme la mauvaise herbe. Les fer-nés eux se mirent en tête d’assiéger Wyndhall, de conquérir voilà le désir et le souhait d'Harwyn Chenu. Le sang noir qui coulait dans ses veines avait l'ambitieux projet d’agrandir les frontières de son territoire et quoi de mieux que l'Ouest pour entamer un nouveau départ ? Les éclaireurs ouestriens constatent avec effroi des dizaines et dizaines de snekkars se profilant à travers la grève. Les fer-nés se sont établis dans un camp de fortune. Les vivres et les ressources sont en quantité suffisante, propice à un assaut rapide sur leur objectif. Au loin on entend raisonner les cloches d'une chapelle sommant les villageois et fermes avoisinantes de venir se réfugier à l'intérieur de l'enceinte de Wynhall. La question obnubilant l'esprit des fer-nés serait de savoir quand ils prendraient les armes pour attaquer. Lord Estren espère lui obtenir l'aide de son seigneur et roi haranguant ses hommes pour se préparer à combattre.

Ce que tu as semé tu le récolteras

« Votre majesté, Whyndhall est tombée ! » Déclare d'un timbre oppressé le chambellan en déboulant dans la chambre royale aux drapés de rouge et d'or ciselés. Dans la pénombre de la pièce le jeune lion et roi du Roc est déjà éveillé le poing fermé contre son front. Il semble insubmersible face à la nouvelle qui vient de lui être annoncée. Cela faisait plusieurs jours déjà qu'il avait connaissance de la situation et pourtant il n'avait donné aucune consigne. À quoi donc jouait le lion au sujet des fer-nés ? Certaines rumeurs parlaient d'une punition à l'encontre du seigneur de la maison d'Estren pour son comportement hautain et vaniteux à la cour. D'autres s'impatientaient et sommaient le roi d'agir face à l'incursion insulaire. Lancel IV lui tenait fermement entre ses mains la missive du prétendu Harwyn Chenu roi autoproclamé des Îles de Fer. Lui qui songeait sans doute obtenir du lord et de sa famille une rançon aussi coûteuse en or pour compenser la perte de ses hommes. Reconquérir un fief était une tâche laborieuse le roi le savait pertinemment. Hors il ne semblait guère ce soucier de ce qu'il adviendrait de l'avenir de la maison Estren. Non il y avait des projets, des plans bien plus importants que de secourir quelques prisonniers et un vassal qui c'était laissé si aisément berné par de vulgaires pillards. Dans son cœur taciturne il nourrissait toujours l'ambition de mener cette guerre qu'il aspirait à accomplir face au Roi Gyles. Une fois encore la chose semblait compromise car tous avaient connaissance de l'alliance entre les royaumes limitrophes du roi Arrec Durrandon et de Gyles III Garderner.

Quoi faire ? Quel choix serait le plus judicieux et opportun dans cette affaire ? La réponse vint un peu plus tard dans la matinée alors qu'un conseil restreint avait été proclamé d'urgence. Les seigneurs et les différents généraux soucieux de connaître l'opinion et les décisions à prendre dans une telle situation. Après une concertation brève et la réflexion faisant son office auprès de leur seigneur et maître Lancel IV déclara.

« Si c'est une rançon qu'ils veulent, donnons aux fer-nés ce qu'ils veulent. Nous libérons lord Estren et sa famille en prenant en compte les conditions de notre ennemi. »

La décision abasourdi une grande majorité des seigneurs réunis. L'incompréhension et le sentiment d'être aussi vulnérable que trahis. Eux qui se targuaient de prendre les armes pour libérer leurs terres de l'envahisseur allaient transiger avec l'ennemi. D'autres comme Alestor Reyne et Adrian Tarbeck se lancèrent un regard plus fermé et sérieux. Lancel IV Lannister avait une stratégie et cette décision qui en ébranlaient plusieurs dissimulait une riposte sans pareil. Dans le cercle de la confidence, les deux amis et plus fidèles compagnons du roi étaient chargés d'une seule et même mission. L'un conduirait le convoi et les coffres sois disant remplis d'or tandis que l'autre avait pour tâche de détruire la flotte insulaire établie.

« Que leurs navires brûlent de mille flèches et qu'aucun ne puisse jamais quitter la berge par laquelle ils sont arrivés. » Vociférait de colère le lion férocement à Alestor et Adrian peu avant l'ouverture du conseil. Dans la plus grande confidence les deux hommes savaient les enjeux et l'importance de la stratégie militaire et de l'effet de surprise. Alestor mobiliserait la cavalerie ouestrienne et Adrian lui s'empresserait de mener à bien les coffres non gorgés d'or mais, de pierre.

Incandescente duperie

« Halte ! » Beugla un soldat sous les ordres du seigneur Adrian. Le convoi s'étirant sur une centaine de mètres ralentit et se stoppe en contrebas du fief. Une ligne constituée d'un chariot et de soldats arborant les couleurs du giron argenté et bleu, armoiries de la maison Tarbeck. Le regard fermé revêtu d'une armure de plate finement travaillé il fit brandir à son aide de camp un drapeau blanc visible depuis le haut édifice de Whynhall.

Les insulaires s'agitaient sur les remparts et de part et d'autres de la cour du castel. Théomore Harloi clopinait blessé durant le siège suivi du jeune Hrothgard Greyjoy. Ils ne cachaient pas une certaine forme d'impatience, le stationnement forcé pour obtenir rançon en échange des quelques otages survivants avait intérêt à être probant. Ils s'attelèrent à annoncer la nouvelle à Harwyn Chenu attablé dans la grande salle et entouré de ses plus fidèles chiens et loyalistes dont le fervent Daegon Berger.

« Les ouestriens sont arrivés, un convoi armé et des chariots comme tu l'avais dit Harwyn. » Entame Harloi avant de s'asseoir pour soulager sa jambe. La parole raisonne et meurt dans le silence. « Et maintenant ? » Réplique la faux sanglante les yeux rivés sur son seigneur disloquant l'aile d'une poularde.

« Maintenant ? Nous allons procéder à l'échange et ne traînez pas. » Déclare-t-il assuré pointant un os entouré d'une chair à demi déchiquetée vers son fervent Berger. « Assures toi que les prisonniers soient relâchés une fois les coffres mis en sécurité. » Rétorque-t-il avant de poursuivre son repas comme si de rien n'était. Un sourire de satisfaction se décrocha des lèvres de Daegon se relevant pour accomplir la mission que son maître lui avait confié. Il ne fallut pas longtemps à celui-ci pour sortir des geôles lord Estren et sa famille. Ses filles amaigries avaient été quelques peu violentées et la dignité de la mère salement écornée.

À bonne distance de la herse Lord Tarbeck attendait. Les chariots avaient été présentement déchargés sous l’œil attentif des fer-nés s’agglutinant sur les remparts pour observer les coffres lourdement chargés. La soif d'or aveuglait la bande de pillards mais Daegon ne perdait pas de vu son objectif. « Lord Estren et sa famille sont ils sain et sauf ? » Questionna âprement Adrian Tarbeck.

« Cela dépendra de la quantité d'or que contiennent ces coffres. » Lança le jeune capitaine fer-né dans un rire communiquant avec ceux de ses guerriers. Un rictus se forma sur le faciès du seigneur qui fit signe à un de ses soldats d'ouvrir un à un les bahuts et dévoiler l'or du Roc tant convoitée. Au regard de tous les pièces d'or s’amoncelaient en abondance assurant de la véracité de la parole du roi Lancel IV Lannister.

« Les otages maintenant ! » Ordonna d'un timbre plus expéditif Tarbeck. Daegon Berger s’exécuta à son tour dans une révérence et un sourire amplement satisfait. Il laissa ses guerriers se saisir de l'or alors que la famille Estren recouvrait enfin à sa liberté.

Pendant ce temps sur les rivages sablonneux les insulaires allaient et venaient dans le campement de fortune tenant les dizaines de snekkars arrimés de cordages et enlisés naturellement par marée basse dans le sable. C'était l'une de ses journées chaudes d'été. Le soleil peu à peu oscillait vers l'océan pour laisser place à la clarté froide de la lune. Ce que les insulaires ne soupçonnaient pas c'était la présence d'un contingent d'hommes mené par le téméraire Lion rouge de la maison Reyne. Alors qu'Adrian Tarbeck avait remplit son rôle c'était désormais au tour d'Alestor d'achever le plan de Lancel.

Une clameur s'éleva au loin par delà la pinède et la cavalerie s'élança par dessus les dunes. Le ciel se para soudainement d'une pluie incandescente, le feu projetant sa chaleur dévastatrice à travers les voiles et les drapés des tentes. Les quelques marins et pillards chargés de la tenue du campement subirent l'effet de surprise si bien que les uns après les autres la cavalcade effrénée mené par Alestor Reyne fit déferlé le feu destructeur sur bon nombre de navires. Dans la forteresse les clameurs et les exclamations triomphales laissèrent place à la rage et la colère des seigneurs et capitaines fer-nés. Sous les quelques tas de pièces d'or qui devaient garnir les fonds des coffres s'aggloméraient  un amas  de lourdes et vulgaires pierres. Les fer-nés aveuglés par l'avidité des richesses tant espérées venaient en quelques heures seulement de perdre une grande partie de leur flotte. Harwyn Chenu le poing serré martelant l'armature du coffre devant lui jurait de faire couler le sang. Le roi déchu avait été dupé et son armée isolée.

La Réformatrice

« Êtes-vous prête majesté ? » Demande timidement une jeune fille cantonnée à attendre sagement à la porte de sa maîtresse. La princesse s'apprête et se pare de drapées aux couleurs chaudes, d'un sobre bijou contemplant le travail méticuleux des petites mains s’affairant tout autour de son corps pour parfaire et mettre en valeur celle qui depuis plusieurs mois s'efforce à rendre son jugement et celui de son peuple meilleur. « Pas encore. » Décoche-t-elle en observant à travers le miroir la silhouette fluette de sa servante.

Cela ne fut pas de tout repos, les nombreuses fois ou la princesse Sélènia a prit la plume se faisait à la lueur d'une chandelle dans l'apaisement et la fraîcheur de longues nuits à mûrir chacune de ses lettres manuscrites. Majoritairement les allées et venues des corbeaux portaient des réponses encourageantes, bénéfiques à l'essor de la Principauté et à son économie. Le prince Dorian et la princesse Naerys multiplièrent les rencontres diplomatiques avec les royaumes belligérants. Certaines idées portèrent leurs fruits et d'autres essuyèrent quelques revers. Sélènia Martell ne cachait pas sa déception face à la dégradation des rapports diplomatiques avec l'Ouest. Il fallait voir le verre de vin à moitié plein plutôt qu'à moitié vide. Sa plus belle réussite était entrain de prendre forme à l'extérieur des murs ensoleillés de Lancehélion. Le problème Rhoynar était un sujet houleux et plein de controverses notamment auprès des bannerets de la Principauté. Qu'importe la paix à tout prix avait permit d'affilier les orphelins de la sang verte à ses sujets rapprochés désormais. En échange de la loyauté et d'un respect de leur culte comme de leurs traditions ils avaient jurés allégeance à la maison Martell. Le peuple de pêcheurs et de commerçants commencèrent peu à peu leur exode sur le sol du vieux continent. Bourg-Cabanes restait le centre névralgique de cette ethnie qui pour bien de leurs semblables avaient depuis des milliers d'années décider de devenir des dorniens en suivant Nyméria. Sélènia leur offrait une chance de conserver leur foi et leur façon de vivre c'était là plus qu'ils osaient espérer. « Allons-y. » Lança-t-elle.

Sélènia prit la route en direction de ce qui semblait ressembler à un attroupement de tentes et de petites masures. Des toiles à la pigmentation colorées provenant sans doute de navires de pêches et de commerces côtiers. Elle fut accueillie par Faykran tout apprêté et mieux vêtu que la première fois qu'ils s'étaient rencontrées. Le fils de pêcheur dirigea la garde rapprochée de la Princesse jusqu'à une petite estrade soucieux de bien faire un siège y était apposée sous un voile de toiles azurés. Plusieurs villageois déjà s'agglutinaient tout autour de cette structure improvisée. Des enfants, des femmes, des jeunes gens à l'apparence modeste virent la remercier, lui offrir des colliers de coquillages et des victuailles en provenance de la pêche locale et d'un artisanat primitif sommaire. Garym était lui aussi présent, il tenait fermement à ce que cette opportunité puisse amorcer un changement profond pour son peuple. C'est là du moins que ce la promesse faites et couchée sur le papier par l'encre respectaient pour l'instant.

Ce que la joie et la reconnaissance camouflait aisément aux yeux de tous c'était la mâchoire acérée et le poing rétracté de Dorian Martell rongé par la colère, le mépris, l'impression de n'être qu'un subalterne à cette grande assemblée. Ils étaient venu la célébrer elle, Sélènia Martell. Le rhoynar au regard affûté observait le jeune prince sans piper mot. Simple intuition ou sensation malaisante sa main restait figée sur le pommeau de son poignard à dent. La paix était un bien plus difficile à préserver que la guerre. La question était de savoir pour combien de temps celle-ci durera.

« Quelque chose vous tracasse majesté ? » Lança Garym au jeune prince Dorian. Le Martell se surprit de voir à quel point ses mains étaient moites et son front perlant de sueur. Une légère moue et un rire gêné lui firent faire volte face rétorquant un brin léger. « Ce n'est rien, la chaleur environnante qui m'indispose depuis mon retour certainement. » Conclut-il s'éloignant pour rejoindre sa place et s'asseoir. Garym l'observa se défiler se murmurant à lui même. « Il va falloir se méfier de celui là. »

La Princesse Sélènia aborde un sublime sourire face à une petite fille lui offrant un bouquet de fleurs sauvages. Se relevant de son siège elle entame alors ces paroles.

« Peuple Rhoynar, la Maison Martell vous accueille sur ses terres pour dénouer les nœuds des inutiles querelles qui divisent nos peuples depuis bien trop longtemps. Le temps des divisions interne est terminé, nous vivons une époque différente de nos prédécesseurs. Sous le règne de notre fratrie, je souhaite rendre la Principauté plus glorieuse et grande.

Dorne doit avancer, évoluer, prospérer pour devenir une puissante nation dont les peuples sont capables de faire front unis. Nous, enfants provenant du même berceau qu’est Essos, nous sommes Dorne.

À partir de ce jour, cette terre vous accueillera, vous et vos enfants, et leurs enfants après eux. Votre culte et vos traditions pourront fructifier sur ce sol, et tant que l’honnêteté, la confiance et la loyauté régneront entre nous, jamais ce sol ne se teindra de pourpre. J’espère que les rires des enfants résonneront encore longtemps afin de créer une nouvelle cité qui deviendra aussi resplendissante que les cités libres d’Essos. Soyez donc les bienvenues, amis Rhoynars, sur ces terres. »